17 erreurs à éviter pour ne pas voir votre manuscrit refusé par les éditeurs
Vous projetez d’envoyer votre manuscrit et désirez par-dessus tout vous faire publier par un éditeur, mais cette terrible phrase vous effraie par-dessus tout :
« Nous avons lu avec intérêt votre manuscrit, mais malheureusement il ne correspond pas à notre ligne éditoriale… »
Seulement 1 à 5% des manuscrits envoyés en maison d’édition sont publiés et parmi ceux-ci, de nombreux auteurs ont déjà été édités…
Personne ne peut donc vous garantir que votre manuscrit sera publié, même répondant parfaitement aux critères. Mais si vous pouviez déjà éviter de faire ces erreurs qui feront à coup sûr le rejeter par les éditeurs…
J’ai donc discuté avec des éditeurs, des auteurs publiés, lu et regardé un grand nombre d’interviews d’éditeurs, comme celle de David Meulemans, des éditions Aux forges de Vulcain et j’en ai retiré 17 erreurs à ne surtout pas commettre au risque de voir votre manuscrit refusé.
1. Le mauvais choix de la maison d’édition
Cela peut vous sembler évident, mais combien de manuscrits de fantasy reçoivent chaque année des éditeurs de littérature blanche ou de polars à votre avis ? Les éditeurs interviewés le disent et le répètent : ils jettent un nombre incroyable de manuscrits qui ne correspondent absolument pas à leur ligne éditoriale !
Parce que l’impression, la reliure et l’envoi d’un manuscrit coûtent un bras, veillez à ce que votre manuscrit ne finissent pas directement à la poubelle sans même que l’éditeur n’en ait lu une seule ligne.
Tapez « maison d’édition [tel genre] » sur votre moteur de recherche préféré et regardez leur site. Est-ce qu’ils publient bien le même genre, voire sous-genre que vous ?
Le mieux reste encore de regarder la maison d’édition des romans que vous lisez et dont vous vous inspirez et d’envoyer votre manuscrit à ces maisons-là. Regardez l’édition originale, pas « Livre de poche », qui rachète les droits pour sortir vos œuvres préférées dans un format de taille réduite.
De plus, avoir lu des romans du même genre que le vôtre de la maison que vous visez, vous permettra de le préciser dans votre lettre d’accompagnement et démontrer à l’éditeur que vous l’avez choisi, lui, de manière consciente et cohérente.
2. Le non-respect des conditions d’envoi
Vérifiez bien si l’éditeur donne des indications spécifiques sur la page « contact » ou « envoi de manuscrit ». Dans le doute, téléphonez-leur pour leur demander le format requis ou l’adresse, ou l’envoi par Internet ou papier ou toute autre indication mentionnée.
Par exemple, durant le confinement, Gallimard affichait sur son site « Arrêtez de nous envoyer des manuscrits ». Vous écrivez ? Montrez que vous savez au moins lire une phrase.
Voici un exemple de ce que l’on peut trouver sur la page contact du Seuil, tout en bas :
Les manuscrits sont les bienvenus. Ils sont à adresser au 57, rue (…)
Avant de nous les envoyer, assurez-vous qu’ils correspondent bien à notre ligne éditoriale. Vous pourrez vous faire une idée de ce que nous éditons en consultant ce site ou, mieux encore, en découvrant nos livres en librairie.
Merci de bien vouloir noter que les manuscrits qui nous sont adressés ne sont pas renvoyés à l’expéditeur. Si vous souhaitez récupérer le vôtre, joignez une enveloppe au format correspondant, affranchie au montant dû pour le renvoi.
3. La lettre d’accompagnement narcissique
Un éditeur jauge votre personnalité à votre lettre d’accompagnement. Cela lui permet de se faire une idée rapidement sur :
- Le contenu de l’ouvrage. Est-ce qu’il correspond à sa ligne éditoriale, est-ce que l’intrigue est prometteuse ?
- Le rapport qu’il entretiendra avec vous (allez-vous lui casser les pieds ?)
- Votre vision d’auteur : pourquoi vous écrivez et ce que vous essayez de communiquer.
Oui, la lettre d’accompagnement est lue. En arrivant le matin, l’éditeur ou le lecteur prend sa pile et lit en premier le manuscrit dont la lettre d’accompagnement lui aura fait le plus envie. Peut-être pas tous, mais beaucoup. Et si j’étais éditrice, c’est ce que je ferais.
La lettre d’accompagnement narcissique vient du manque de confiance en soi. Cela donne soit une lettre prétentieuse, soit faussement humble et surtout, complètement à côté de la plaque. L’écrivain tente de compenser ce manque de confiance par une tentative maladroite de séduction sur sa propre personne.
Donc évitez :
- De raconter votre vie.
- L’autopromotion ou pire, l’autocongratulation.
- La flatterie. C’est grossier et visible.
- La fausse humilité (je sais que je ne suis personne, oserai-je attirer votre attention…)
- L’humour (À lire d’urgence ! Chef-d’œuvre !)
- Les phrases clichés (J’espère que vous prendrez autant de plaisir à lire ce manuscrit que j’ai eu à l’écrire.)
Alors, oui, il faut séduire, mais en désirant séduire, vous ne séduisez pas (comme dans la vie). Pour sortir de cet écueil, focalisez-vous sur l’autre, pas sur vous-même. Pensez : « comment puis-je davantage satisfaire les besoins de cet éditeur ? », plutôt que « comment puis-je davantage lui plaire ? ».
Mettez-vous à sa place : il veut savoir ce qu’il y a dans ce fichu bouquin (en gros), qui vous êtes (en gros) et pourquoi vous voulez publier chez lui particulièrement. Tout ce qui s’écarte de ces besoins sera lu comme étant de trop.
Pour faire baisser le narcissisme en un temps record, lisez cet article très radical : Tu écris des romans et tu es un caca. (Je résume : l’auteur n’est rien, le manuscrit est tout).
La lettre idéale présente :
1. La raison pour laquelle vous publiez chez lui.
Pourquoi vous appréciez cet éditeur et les livres qui vous ont plu chez lui et qui justement sont du même genre que le vôtre. La ligne éditoriale compte. Reprenez les mots qu’il utilise (ou des synonymes). Par exemple sur la page Présentation et histoire des éditions du Diable Vauvert, ils disent :
Défendre de jeunes Français impertinents (…) sans oublier des précurseurs visionnaires (…) des voix faisant matériau littéraire du réel et de la langue vivante, en rupture avec tout académisme de style, ironiques, transfictionnelles et littérairement queer.
Vous pourrez dire un truc comme « J’ai adoré (tel ou tel livre que vous avez publié). Comme ces auteurs, je défends une écriture créative et avant-gardiste qui tente de briser les dogmes, tout en explorant un style sarcastique qui serait propre à l’identité non-binaire. Je me reconnais dans votre ligne éditoriale indisciplinée… »
Évidemment, il faut que ce soit vrai. 😀
2. Qui vous êtes
Chacun se voit comme un univers, mais l’autre veut juste nous mettre dans une boîte correctement étiquetée. Il faut s’y faire : grandir c’est aussi accepter de choisir son étiquette.
Donc évitez les phrases à rallonge racontant l’origine de vos inspirations fécondes et allez à l’essentiel. Vous n’avez jamais rien envoyé ? Vous n’êtes pas connu ? Comme 99% des gens qui envoient des manuscrits ! Cherchez votre spécificité en la reliant à ce que vous avez écrit.
Vous avez écrit un livre pour enfants ? Dites que vous êtes maman. Vous avez écrit un roman de fantasy ? Dites que vous écrivez des contes depuis l’enfance…
Vous avez gagné un prix ? Précisez-le. Sauf si c’est hors sujet (prix de la nouvelle rose pour un polar noir), totalement inconnu (1er prix du Grand Concours de l’Imaginaire des Beta-lecteurs Associés sur Facebook, 15 participants) ou un peu ridicule (finaliste du concours « Gruyère et autres fromages à trous » organisé par la médiathèque de la ville de Gruyère. Si c’est pour un essai culinaire, ça passe. 😉 )
Vous n’êtes absolument personne (version boîte, pas version univers), n’avez rien à dire sur vous qui soit en rapport avec ce que vous avez écrit et vous n’avez remporté aucun prix ni publié quoi que ce soit ? Vous avez aussi l’option de ne pas vous présenter du tout, pour attiser la curiosité et conserver un certain mystère.
3. Ce qu’il y a dans votre livre
Ne faites surtout pas une 4ème de couverture. Le but n’est pas de séduire un lectorat, mais d’informer l’éditeur.
Le titre, un pitch en une phrase et une ou deux autres phrases max pour expliquer votre démarche et votre genre.
Exemple :
En 2104, une mission de vingt-deux personnes est envoyée sur Mars et l’un des membres est assassiné. Ce roman de science-fiction aborde aussi le genre du polar. L’enquête est un prétexte à l’exploration des relations humaines dans des conditions extrêmes, tout en imaginant les dérives de l’idéologie transhumaniste. (Avez-vous reconnu l’idée 13 de mes 43 idées de romans ?)
4. Formule de politesse
Une phrase simple et respectueuse.
Exemple :
Je vous remercie de l’attention que vous porterez à ce manuscrit.
5. Suivez votre instinct
Ces conseils sont génériques. Parfois, vous sentez, en lisant le site de l’éditeur, en l’ayant déjà lu ou entendu parler en interview, que vous pouvez vous permettre une lettre d’accompagnement d’un style un peu plus informel. Suivez aussi votre instinct !
4. Une présentation de manuscrit créative
Vous êtes un écrivain et l’éditeur veut publier un écrivain, pas un graphiste et encore moins un graphiste amateur de 1998.
N’envoyez donc surtout pas, un manuscrit :
- Décoré. Une « jolie » image sur la couverture, c’est un manuscrit à la poubelle. De même que des stickers, du papier de couleur…
- Relié avec du raphia, de la laine, du scotch, voire pas relié du tout.
- Une police autre que Times New Roman, voire rédigé à la main. Je rappelle que la typo Comic Sans MS est désormais interdite par la loi.
Votre manuscrit doit être présenté ainsi (sauf précision de l’éditeur) :
- Première page avec le titre et votre nom.
- Impression recto uniquement.
- Police Times New Roman, taille 12, interligne 2.
- Texte justifié.
- Alinéa à chaque début de paragraphe, pas de saut de ligne entre les paragraphes.
- Tiret semi-cadratin pour les dialogues comme ceci : – (et non ceci – ou ceci —)
- Pages numérotées.
- Marges larges (pour les annotations de l’éditeur). En général, 2,5cm, mais à voir avec l’éditeur.
5. De trop nombreuses fautes
Vous avez passé les 4 étapes précédentes et l’éditeur a enfin daigné poser un œil sur vos premières lignes de manuscrit, voilà l’erreur principale qui fait de nouveau voler le manuscrit à Mach 4 à la poubelle : les fautes !
Vous avez passé du temps à écrire et à relire ? Que cela ne vous dispense pas de vous corriger !
L’orthographe n’est pas tout. Les fautes peuvent aussi être liées à la grammaire, la conjugaison, ainsi qu’à la syntaxe et à la typographie. Sans oublier les erreurs de style : répétitions, aberrations, pléonasmes…
Si vous doutez de vous, faites appel à un correcteur pro, vous en avez partout sur la toile, à différents tarifs.
6. Un incipit pas assez travaillé
Voici ce qui arrive à un nombre conséquent d’excellents manuscrits : ils finissent à la corbeille. L’intrigue est passionnante, les personnages attachants, le style magnifique et pourtant, on ne leur a laissé aucune chance.
Cela est bien entendu lié à l’incipit, ces fameuses premières lignes qui doivent accrocher pour que l’on ait envie de poursuivre.
Si vous devez passer des heures sur un passage, que ce soit celui-ci.
7. Une fin bâclée
Dans la grande majorité des cas, le manuscrit est inachevé. J’entends par là que la fin y est souvent bâclée, que le travail de relecture n’est pas complet, qu’il reste d’importantes lacunes dont je devine pourtant l’auteur capable de venir à bout. De toute évidence, il était épuisé lorsqu’il m’a envoyé ce manuscrit. Il n’avait plus assez d’énergie et de confiance dans son travail pour le terminer vraiment, avant de le soumettre à ma critique.
Compte tenu de l’état de lassitude qui émane de ce travail bâclé, je me dis qu’il va être très délicat de venir à bout de toutes les imperfections qui plombent ce texte. La tâche est lourde et je risque de travailler pour rien, car l’auteur est déjà à la limite du découragement. Si je lui annonce que j’accepte son manuscrit sous réserve de modifications, il va bien entendu sauter de joie et retrouver du courage. Mais pour combien de temps ? Cela suffira-t-il au travail important qu’il reste à faire ? Luc Deborde – Éditions Humanis
Beaucoup d’éditeurs lisent dans cet ordre : le début, puis, si celui-ci accroche, la fin et enfin, quelques pages au hasard au milieu avant de décider de s’attaquer ou non à la lecture complète.
Vous êtes heureux d’avoir enfin achevé votre manuscrit et vous vous dites que la fin n’a pas à être trop travaillée, qu’elle est moins importante, alors que la fin est l’écho du roman, les derniers mots laissent une impression durable ou non, résolvent toutes les questions posées au cours de l’histoire. Bâcler le dénouement est une erreur à ne surtout pas faire !
8. Un mauvais style
L’intrigue ne fait pas tout. Même si l’histoire est passionnante, travaillez un minimum votre style, histoire que l’éditeur ne soit pas complètement rebuté à la lecture de votre manuscrit.
Qu’est-ce qui est considéré comme un mauvais style ?
- L’absence totale de style. Contrairement au style simple qui permet de se concentrer sur l’histoire (la vraie simplicité, c’est la marque du génie), l’absence de style ressemble plutôt à une dissertation de français. Les tournures sont justes, les phrases efficaces, mais le tout laisse une impression de vide. Comme dit Jules Renard : « Le mauvais style est une pensée imparfaite. » Et l’absence de style résonne donc comme une absence de vision.
- Le style alambiqué. Les écrivains débutants (ou moins) tombent souvent dans cet écueil : ils font de l’écriture au lieu d’écrire. Lorsqu’on les lit, on a le sentiment qu’ils se relisent tout en écrivant, au lieu de se laisser emporter par l’histoire qu’ils ont envie de nous raconter. Or, un écrivain qui se regarde ne semble pas prêter attention à son lecteur et ça, c’est rédhibitoire.
- Un manque de fluidité. On dirait que chaque phrase a été écrite séparément, à plusieurs jours d’intervalle. On a l’impression d’un paragraphe à l’autre de passer d’un auteur à un autre auteur. Cela laisse une impression de schizophrénie qui n’a rien d’artistique.
- Des règles de stylistique méprisées. « Je suis un artiste, donc il n’y a aucune règle, donc je fais n’importe quoi. » N’oubliez pas que les règles doivent être connues pour être transgressées. Vous êtes sensés comprendre ce que vous écrivez et comment vous l’écrivez. Même si vous n’êtes pas forcément capable de rédiger une thèse dessus, on doit sentir que vous avez lu et écrit beaucoup avant d’avoir emprunté ces sentiers détournés…
9. Le plagiat
Je ne vais pas m’appesantir sur ce sujet trop longtemps. Copier, ne serait-ce qu’une phrase, est non seulement illégal, mais en plus…WTF ! Vous voulez être connu pour votre propre talent ou pour celui d’un autre ? Quelle satisfaction auriez-vous à être apprécié pour une imposture ?
En plus, vous prenez l’éditeur pour une andouille inculte en faisant ça… Si jamais il le repère, je ne donne pas cher de votre manuscrit et de votre réputation, vilain garnement.
Mais le plagiat ne s’arrête pas là. Il y a aussi le plagiat « sans en avoir l’air ».
J’aime bien le terme employé par Copycomic : la gaderie.
Il y a quelques années, un mystérieux youtubeur se faisant appeler Copycomic a repéré dans les spectacles de Gad Elmaleh plusieurs plagiats, mais les vannes avaient été modifiées de telle sorte à ce qu’on ne s’en rende pas compte. (Je précise que je ne juge pas son humour ni la qualité de ses spectacles et rappelons que la grande majorité de ses créations sont totalement de lui.)
Prenons un exemple avec une phrase que j’ai prise dans un roman au hasard, Les dames blanches de Pierre Bordage :
Il aurait aimé la croire sincère, mais les doutes, comme les charognards s’abattant sur les cadavres lors des accalmies, venaient sans cesse déchiqueter son esprit.
La gaderie :
Il avait envie de la croire, mais il mettait en doute sa sincérité et ses doutes étaient comme des vautours tournoyants au-dessus de son esprit putréfié.
L’idée originale est que les doutes sont comparés à des charognards qui viennent dévorer l’esprit comparé à un cadavre. Que vous disiez vautours, que vous mélangiez les mots, que vous utilisiez des synonymes, n’y change rien : it iz a plagiat.
Ce qui n’est pas du plagiat :
- L’imitation d’un style. Bon, vous ne serez pas très original, mais le style, c’est-à-dire, un rythme, une manière d’agencer les phrases, une intention, ce n’est pas du plagiat et c’est souvent comme ça qu’on débute.
- L’inspiration évidente. Créer un détective de polar qui s’appelle Christophe Haulden et qui est jeune et un peu perdu, parce que vous voulez faire référence à L’attrape-cœurs, c’est évident, et ce n’est pas du plagiat, c’est un hommage.
- La citation. Vous avez le droit de citer un auteur et il faut le mentionner clairement.
10. Surfer sur un succès
Un peu comme le plagiat, prendre des éléments de ce qui a créé un succès, c’est faire preuve d’une totale absence d’originalité. Et c’est triste !
En attendant Bojangles a été un carton ? Et si j’écrivais moi aussi une histoire d’amour avec une femme ayant des problèmes psys sur un ton léger ? Ou encore totalement fan de Millenium, vous avez créé un polar avec une jeune hackeuse gothique ?
Stop. Comprenez ceci : il n’y a pas d’idées à succès. L’idée géniale, maltraitée, sans style, avec des personnages sans épaisseur, n’est qu’une idée gâchée. Ce n’est pas l’idée qui a créé le succès, alors sortez-vous de la tête ce genre de fantasmes : Et si je remontais le temps avant Harry Potter et que j’écrivais Harry Potter ? Vous n’êtes pas capable d’écrire ce qu’a écrit un autre. Écrivez vos propres idées, vos propres visions.
11. Un ouvrage trop long
À votre avis, l’éditeur recevant un ouvrage de 900 pages se dit :
Réponse A : Chouette ! Je sens que je vais passer un moment formidable. Vite, lisons ! Avec un peu de chances, je l’aurai terminé avant l’été.
Réponse B : Misère…
Oui, voilà. Pour écrire 900 pages, vous avez VRAIMENT intérêt à ce qu’aucune phrase ne soit indispensable. Il y a une règle qui devrait être inscrite dans le marbre pour les auteurs débutants : bien souvent, la moitié du livre suffit à exprimer ce que vous avez voulu dire.
Que votre premier jet fasse 900 pages, aucun problème ! Mais ensuite, taillez dans le gras, sans complaisance. Réduisez jusqu’à extraire l’essence même de votre livre.
Vous doutez de l’utilité de certains passages ? Enlevez-les tous et faites relire à un bêta-lecteur. Il a tout compris ? Rien ne lui a manqué ? Voilà.
12. L’autobiographie et autres genres invendables
J’ai écrit un long article et même toute une formation qui l’explique : l’autobiographie, à savoir, écrire un livre qui raconte sa vie, n’est pas vendeur et aucun éditeur ne l’acceptera.
Vous pouvez néanmoins écrire une autofiction, mais celle-ci devra être :
- Un témoignage sur une expérience spécifique (en général douloureuse).
- Une autofiction.
Mais dans ce cas, il faudra soit ne pas le dire (pourquoi le dire ? Si c’est une bonne histoire, c’est une bonne histoire, la vôtre ou non), soit qu’elle soit vraiment exceptionnelle. Tout le monde a envie de lire l’histoire d’un type qui a survécu à un crash d’avion en vrai, personne n’a envie de lire votre divorce difficile (sauf si c’est raconté de manière très drôle et très originale).
En gros, vous vous dites : « Hey, mais ce que j’ai vécu me semble intéressant, ça devrait donc intéresser les autres ! », lâchez l’affaire.
L’autofiction doit être traitée comme un roman. Si vous ne savez pas faire de vous-même et des personnes qui vous entourent de vrais personnages, si vous n’avez pas envie de faire des choix dramatiques, de romancer, ni d’extraire l’essentialité de ce que vous avez vécu, inutile de rêver. Mais si vous êtes prêts à le faire, je vous apprends comment le faire.
13. Attention à la trilogie
Vous avez l’intention d’écrire une trilogie (ou duologie ou quadrilogie, bref). Selon l’éditeur et là où vous en êtes, ça peut jouer en votre faveur comme vous desservir. Pourquoi ?
Parce que l’éditeur veut pouvoir compter sur vous pour écrire la suite, histoire que ça ne parte pas en saucisse comme avec George R.R. Martin qui n’a jamais terminé la saga du trône de fer (et à cause de ça, on a laissé les scénaristes d’Hollywood deviner la fin et ça n’a pas convaincu des masses…)
Déjà, évidemment, il faut s’adresser à un éditeur qui est habitué à publier des séries. D’autre part, il faut lui démontrer que vous êtes capable d’écrire la suite. Et comme vous n’allez pas envoyer un manuscrit du poids d’un enfant en bas âge, vous devrez le convaincre que les tomes suivants sont déjà écrits et que vous êtes prêts à les lui envoyer s’il est botté par le premier.
Je vous conseille à partir de ce que j’ai lu et entendu de la part d’éditeurs et d’auteurs publiés :
- Écrivez au moins deux tomes avant d’envoyer quoi que ce soit et le troisième doit être en cours de route.
- Quel que soit le nombre de tomes de la série, ayez le synopsis de tous les tomes élaborés.
- N’envoyez que le premier, dites que vous êtes prêt à envoyer le 2ème et donnez le synopsis de tous.
En plus, d’avoir écrit le tome 2 avant d’envoyer le tome 1 vous permettra de vous relire et de corriger, voire même vous laisser l’opportunité d’orienter votre récit (et donc les tomes suivants) différemment.
14. Le harcèlement
J’ai entendu ceci à plusieurs reprises : « Ils ne me répondent pas. Si ça se trouve, ils ont perdu mon manuscrit ou ne l’ont pas reçu ! Si je les appelais pour m’en assurer ? »
Remplacez éditeur par « personne désirable que vous convoitez » et manuscrit par « SMS » et vous comprendrez le pathétique de la situation.
On ne peut pas dire qu’appeler une fois est du harcèlement, mais si l’éditeur ne vous a pas recontacté dans le mois, c’est qu’il n’a pas encore lu votre manuscrit ou qu’il a été mis à la poubelle. Si la maison d’édition est grande, la personne de l’accueil vous le dira : « c’est minimum 6 mois d’attente » et ne se formalisera pas. Si c’est un plus petit éditeur, il peut se formaliser et risque de vous classer dans la catégorie des casse-nouilles.
Alors, si vous appelez plusieurs fois, que vous envoyez des e-mails, voire vous offusquez d’avoir reçu une réponse négative, votre nom risque fort d’être placé sur une liste noire, ce qui aura pour effet magique de diriger l’ensemble de ce qui provient de votre plume, directement de la boîte aux lettres à la boîte aux détritus.
À se rappeler : une grande maison d’édition met en général 6 mois à répondre, une petite entre 1 mois et 2 mois. Certaines vous disent combien de mois attendre précisément. Certaines n’ont pas assez d’argent ni de personnel pour envoyer des réponses à tout le monde. Au lieu de ronger votre attente, écrivez autre chose.
15. Un nom d’auteur peu vendeur
La plupart des noms sont passe-partout, mais si vous vous appelez Micheline Trochu et que vous souhaitez percer dans la fantasy ou la SF songez plutôt à un nom de plume de type Valentine Purple ou Andromeda Clark.
Devez-vous prendre un nom de plume ? Oui, si :
- Votre nom est daté, mais pas dans le genre « vintage », plutôt dans le genre « vinasse » : Gérard, Robert, Josiane…
- Votre nom dit « Je viens d’un milieu superprolo, je suis né en 1980 et j’avais un mulet, une queue de rat et une boucle d’oreille quand j’étais enfant » : Kevin, Jennifer, Brian, Dylan, surtout si votre nom de famille est moche : Jennifer Proutier, combo.
- Vous écrivez de la fantasy ou de la littérature de genre très genrée, SFFF, dark romance, etc. Les lecteurs achètent autant sur le nom de l’auteur que sur la couverture dans ces genres-là.
- Vous en avez envie, pour toutes les raisons qui vous semblent bonnes.
Non, si :
- Votre nom est déjà génial. Vous vous appelez Valentine Merle ou Ambre Perrault et je vous imagine avoir des parents formidables et boire du thé bio dans votre deux-pièces avec parquet du 9ème arrondissement. Je ne vous déteste pas du tout.
- Votre nom, même un peu moche, colle au registre. Humoristique, polar noir, absurde…
- Votre nom est banal. C’est pas grave. Le talent donne de la noblesse à n’importe quel nom. On ne lira plus Stéphanie Hochet, mais CETTE Stéphanie Hochet LÀ, qui a écrit Je ne connais pas ma force.
- Vous écrivez de la littérature blanche. Un peu tous les noms collent. C’est le style qui comptera avant tout.
- Votre livre est génial, super bien écrit, votre lettre d’accompagnement est top. Si l’éditeur veut que vous ayez un nom de plume, il vous le suggérera.
Comment trouver un chouette nom de plume ?
J’écrirai un article là-dessus prochainement, mais en attendant, voici quelques astuces :
- Utilisez un anagramme. Rendez-vous sur le générateur d’anagrammes et entrez votre nom dans la case « générateur de faux nom et pseudonyme ». Mon nom pourrait être Esther Phigouai (non).
- J’ai vu une astuce récemment sur l’Instagram de Lucie Castel : prenez le nom de votre premier animal de compagnie et la couleur de vos sous-vêtements et mettez-là en anglais. Genre Kiki Black. 😀
- Sinon, vous avez ici un générateur de noms de plume pour plusieurs langues. (Il n’y a pas que des résultats brillants, j’ai tapé S et Français, je suis tombée sur « Sophie Paquet », sérieusement. Mdr.) Essayez avec la langue allemande, ça donne des prénoms sympas !
16. Le manque de persévérance
Quel est le point commun entre Michel Bussi, Anna Gavalda, Marcel Proust et JK Rowling ? Ils ont tous été refusés par de nombreux éditeurs avant d’être acceptés ! Margaret Mitchell bat même des records avec 36 refus pour Autant en emporte le vent, prix Pullitzer !
Certains écrivains misent tout sur une ou deux grandes maisons d’édition et, refusés, se disent qu’ils auront tout essayé, en vain.
Ok, ça coûte cher, mais misez plutôt sur une vingtaine de maisons, et surtout pas uniquement de grands éditeurs connus ! Si vous écrivez de la littérature de genre, visez deux ou trois grandes maisons (qui ne tente rien n’a rien) et plutôt dix-sept spécialisées. Si vous écrivez de la littérature blanche, faites 10-10 (voire 10-15, voire 10-20).
Si vous n’avez pas de budget, essayez au maximum de viser des maisons qui acceptent l’envoi par email. Achetez une petite relieuse (30 balles sur Internet) et cherchez un imprimeur qui fasse de bonnes remises sur l’impression en gros. Oui, 400 pages x 20, ça fait bien 8000 pages.
17. Vous ne lisez pas
Et vous pensez que ça ne se verra pas ?
Les gens lisent de moins en moins et paradoxalement écrivent de plus en plus. (Si vous voulez l’explication de ce mystère, j’en ai une que j’ai développée ici : ces personnes sont coincées sur la scène.)
Résultat : les maisons d’édition reçoivent de plus en plus de manuscrits et surtout un pourcentage de plus en plus important de mauvais manuscrits.
J’ai bêta-relu et coaché de nombreux auteurs. Lorsque celui-ci ne lit pas ou peu, je peux le voir en un clin d’œil. Des erreurs grossières apparaissent que des lecteurs chevronnés ne feraient jamais. Non, je ne vous dirai pas lesquelles. Lisez, un point c’est tout.
Bonus : 3 conseils
1. Un manuscrit envoyé fin août
Avez-vous déjà entendu parler de la rentrée littéraire ? Les éditeurs sont débordés de choses à faire pendant les mois d’août et septembre. Les manuscrits reçus à cette période ont donc plus de chance de passer à la trappe :
La fatigue rend moins tolérant. La moindre faute, la moindre tournure bâclée, une lettre cafouilleuse et pouf, the manuscrit in the poubelle !
2. Exiger des clauses de confidentialité
Vous vous prenez pour un ancien espion du KGB et vous accompagnez votre manuscrit d’un contrat de confidentialité à signer. En réalité vous flippez qu’on vous vole votre idée de génie. J’en parle ici.
Personne ne signera une telle chose et votre manuscrit ira où ?
Réponse A : sur la table de chevet de l’éditeur
Réponse B : à la poubelle.
3. Envoyer un premier jet
Les auteurs connus peuvent faire ça. Pas vous. Relisez, relisez et relisez encore. Une fois que vous avez relu, corrigez, corrigez et corrigez encore.
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Sophie Gauthier vous apprend à écrire et à vivre de vos écrits. Articles, livres, romans, pages de vente : découvrez comment rédiger et devenir un pro de la plume !
Par ces hasards improbables, alors que chahuté dans le train reliant Assouan à Louxor, mon attention fût captivée par la pertinence vos conseils. Je viens de rédiger moi-même une bonne « tartine » sur une partie de mon existence. J’en suis à la énième relecture avant de peut être penser à l’édition. Vos propos me sont donc d’une grande utilité et vont alimenter ma réflexion. Je vous remercie pour cela.
Merci pour tous ces bons conseils, Sophie.
Certains paraissent évident, mais un rappel ne fait pas de mal.
Bonne continuation
Roxane
Merci beaucoup Sophie pour ce nouvel article ! En plus d’être très inspirant, j’adore ton humour.
C’est vraiment super que tu prennes le temps d’écrire sur tous ces sujets.
Merci beaucoup Odile 🙂
Bonjour Sophie,
Merci beaucoup pour votre article qui est extrêmement intéressant et utile, comme toujours ! 🙂
Merci beaucoup Jason ! 🙂
Bonjour, merci pour ces conseils très précieux. Je ne pensais pas qu’en me lançant dans cette aventure, je gravirais l’Everest. j’en suis à la troisième réécriture de mon premier roman et chaque fois, j’y découvre des fautes, répétitions, etc.. Un béta lecteur est indispensable. et surtout ne pas se vexer de ses commentaires. (la partie la moins facile)
prochaine étape, envoi à l’éditeur
merci
Merci Dominique ! Oui, il faut voir son manuscrit comme la chose jugée, par se sentir jugé soi-même, difficile de passer ce cap, mais une fois franchi, ça enlève toute pression. 🙂
Article très intéressant et sympa, j’ai beaucoup ri 🙂
Haha ! Merci Fabien 🙂
Ca m’a fait tellement rire! Surtout les noms de plume 😀
Haha, merci 🙂
C’est un article aussi brillant que précieux. Merci pour ton travail. Je le relirai plusieurs fois tellement il est dense en informations !
Merci Abothine ! 🙂
Bonjour,
Sensible aux recommandations présentées ici – le débutant que je suis, a beaucoup à apprendre, mais l’éternel apprenti qui bouge en moi depuis longtemps, regarde, écoute et avance.
Merci – belle journée
Merci Michel, je suis moi-même une éternelle apprentie ! 🙂
Bonjour, merci pour ce nouvel article encore constructif. J’ai toujours plaisir à vous lire et j’adore votre humour. A bientôt.
Merci beaucoup Carémoli !